Le pastel


Le pastel traditionnel.

Ni dessin ni peinture, cette technique assez récente s’impose dès le XVII siècle par son velouté et la fraîcheur de ses coloris dans l’art raffiné du portrait. Edgar Degas, au XIX siècle, lui invente des techniques de mise en œuvre jamais égalées. Le XX siècle voit apparaître les pastels à l’huile.
Le pastel apparaît au XVe siècle dans les rehauts de dessins préparatoires aux portraits. 
 


Au XVII siècle, la vogue des dessins florentins lui confère un statut à part entière. Cette technique se prête à l’art délicat du portrait ; elle favorise le croquis rapide et sa texture poudrée traduit remarquablement l’aspect velouté de la peau. Le XVIII siècle en est l’âge d’or, avec Jean-Baptiste Siméon Chardin (1699-1779), Quentin de La Tour (1704-1788), Jean-Baptiste Perronneau (1715-1783) et Élisabeth Vigée-Lebrun (1755-1842).
 


Le pastel, composé de pigments finement broyés liés de gomme arabique et de miel, se présente en bâtonnets friables de section ronde ou carrée rangés dans des boîtes de couleurs assorties de 45 à 90 unités, qu’il est possible de réassortir.
Le support est un papier, un tissu, du carton, du papier de verre, etc., tout matériau à texture susceptible d’accrocher la poudre à sa surface. La couleur est préférable au blanc, elle crée une atmosphère et valorise les touches colorées.



Les pastels à l’huile: Le pastel gras ou à l’huile est une invention récente. Grâce à la cire qui le compose, il possède un glissé agréable et un pouvoir colorant puissant. Les couleurs sombres contenant davantage de cire se révèlent plus couvrantes, mais aussi plus tendres. Ces qualités varient selon les marques. Les bâtonnets de section ronde, protégés par un papier, sont présentés dans des boîtes. Ce pastel adhère à tous les supports et sa texture est lisse et brillante.




Les techniques d’utilisation: Avant de colorer au pastel traditionnel, l’artiste installe son motif au fusain sur le support oblique ou vertical. Il ne fabrique pas la couleur, il la choisit pour sa nuance, la juxtapose, la superpose à une autre (clair sur foncé) en un jeu de variations colorées de couleurs pures. Fondus et modelés naissent sous l’estompe et le chiffon. Les traces du geste s’inscrivent en hachures croisées ou parallèles plus ou moins espacées, un chiffon claqué prestement à la surface atténue la trace indésirable. 


Le pastelliste mène le travail dans sa globalité, il «monte» les couleurs sur tous les fronts. Il lui faut « oser colorer » et reculer souvent pour juger de l’effet produit. Le pastel craint la lumière et exige la protection d’un verre.
Le pastel gras autorise les mélanges, les superpositions, les frottages au doigt ou au chiffon et favorise la diversité des techniques mixtes : pastel et encre de Chine, pastel et gouache ou encres colorées… Le pastel repris au pinceau mouillé de térébenthine présente l’aspect d’une peinture à l’huile. Les bâtonnets chauffés à la flamme se transforment en une pâte épaisse qu’il est possible de travailler au couteau.



Edgar Degas (1834-1917) a passionnément utilisé le pastel traditionnel, mais au savoir-faire de ses prédécesseurs, qu’il s’approprie, il ajoute une inventivité dans l’expérimentation qui lui permet de mettre au point des techniques encore inégalées. Il est à l’origine des techniques combinées ou mixtes.
Il commence tout d’abord par utiliser le pastel pour rehausser les peintures à la détrempe qui présentent un caractère d’opacité comparable, puis, séduit par la rapidité de mise en œuvre de celui-ci, il multiplie les expériences. L’artiste innove ; il utilise le pastel « mouillé », alterne l’emploi direct du bâtonnet humidifié et celui d’une pâte étalée au pinceau, obtenue soit en broyant la couleur dans de l’eau soit en humidifiant le support avec de l’eau bouillante vaporisée. 



Certains pastels doivent leur éclat à un procédé complexe. Degas isole les hachures superposées ou juxtaposées à l’aide d’un fixatif (indéterminé) qui donne une meilleure adhérence pour l’étape suivante, une reprise au pastel libre. Il se préserve ainsi de mélanges malencontreux tout en gardant la couleur et l’aspect velouté incomparables de cette technique.
Les inventions de l’artiste s’attachent également à la transformation des supports, qu’il gratte, brûle partiellement afin d’accrocher le pastel, et à la fabrication de fixatifs. Ces derniers n’ont jamais été performants (pastels jaunis ou ternis), et les œuvres les plus éclatantes de fraîcheur sont celles qui n’ont pas été fixées, comme par exemple les pastels de Quentin de La Tour. Degas aurait bénéficié d’une recette « idéale » transmise par son ami Luigi Chialiva et dont le secret a résisté aux examens scientifiques.



Une mise en œuvre visible:
L’ébauche de la mise en place au fusain reste visible sous le pastel. Degas alterne longues hachures (bas du tableau et bras vertical) et hachures croisées (tutu et bras replié). Il écrase un pastel pâteux sur la poitrine de la danseuse et la main de la seconde et matérialise le vaporeux des tutus et le banc brun au pinceau mouillé. Sous la signature, la couleur laisse transparaître un repentir de contour (intention abandonnée).


Commentaires

Vero a dit…
Passionnant ! J'ai 1 envie folle d'essayer toutes ces techniques ...
Nicole N a dit…
Saisissant et fascinant à la fois.
Merci pour ce partage Didier.

Posts les plus consultés de ce blog

Les palettes limitées: La palette Zorn.

Max Ernst, technique du frottage

Dessin à l'encre de Chine

Pierre Bonnard

Henry Patrick Raleigh