Le glacis dans la peinture

Le glacis, je vous en parle toute l’année à Fayolle, alors voilà de quoi réviser vos connaissances… n’hésitez pas à poser des questions et à poster un commentaire…



Le glacis est une technique de la peinture à l'huile consistant à poser, sur une couche déjà sèche,
une fine couche colorée transparente et lisse.
Le glacis est aussi possible à l'acrylique ou avec des encres ou peintures à base de gommelaque1.
Le jargon d'atelier de peinture a tendance à employer le terme « glacis » pour toute superposition
de couches de peinture laissant transparaître la couche inférieure2.
Définition
Le glacis consiste à superposer une ou plusieurs couches de peinture transparente, qui produisent
un effet de profondeur. La surface de la couche colorée doit être parfaitement lisse, et réfléchir la
lumière. Les traces du pinceau doivent être imperceptibles, faute de quoi la diffusion de la lumière
s'oppose à l'effet de transparence. La peinture se regarde dans la pénombre avec une lumière
latérale, sinon on ne voit que les reflets.
Lorsque la peinture n'est pas complètement transparente, comme il se peut avec une couleur
opaque dispersée dans une grande quantité de liant, l'effet est celui d'un voile sur le fond. Il vaut
mieux parler alors de « vélature »3.
Principe
Quand une surface est mate, elle diffuse en tous sens la lumière qui lui parvient de n'importe
quelle direction. En conséquence, on ne parvient pas à lui donner une teinte profonde. Chacun
peut en faire l'expérience : un papier noir est gris à côté de la surface laquée noire d'un piano.
Pour obtenir une couleur profonde, il faut une peinture lisse et transparente. En contrepartie, les
couleurs intenses ne peuvent rester lumineuses : la proportion de lumière réfléchie est d'autant
plus faible que la plage du spectre visible concernée est étroite.
La technique du glacis consiste à poser, sur une ébauche mate, une ou plusieurs couches fines et
lisses qui vont agir comme un filtre optique. Un glacis produit une couleur plus intense qu'un
mélange des pâtes sur la palette. En effet, si la couche de peinture contient un pigment
transparent et un pigment opaque, celui-ci va renvoyer une lumière colorée diffuse avant qu'elle
n'ait traversé la couche. Le pigment transparent, qui ne filtre la lumière que selon l'épaisseur
traversée, suivant la loi de Beer-Lambert, a peu d'effet. Au contraire, si la couche transparente se
trouve au dessus de la couche opaque, elle joue à plein, sélectionnant les radiations lumineuses,
pour obtenir une couleur plus profonde.
Exemple :
Un glacis carminé sur un bleu de cobalt (opaque) produira un effet violacé plus
intense qu'un mélange opaque de carmin et du même bleu sur la palette.
La couleur que perçoit le spectateur face à un tableau peint à glacis dépend un peu de la longueur
du trajet de la lumière dans la couche transparente, et, donc, de l'éclairage ainsi que, dans une
certaine mesure, de la direction d'observation, ce qui contribue à l'impression de profondeur.
La technique du glacis a aussi l'avantage d'isoler les pigments dans une couche de liant, ce qui
limite leurs interactions chimiques4. Cette propriété est surtout d'intérêt historique, car ces
incompatibilités concernent surtout des pigments anciens souvent remplacés à cause de leur
mauvaise tenue ou interdits à cause de leur toxicité. Il faut en tous cas éviter, pour glacer, d'avoir
en fond les couleurs qui percent à travers les couches, comme le bleu de Prusse et les diverses
terres ocres5.
Dans les techniques plus rapides qui conservent un peu du relief de la toile à la surface de la
peinture, un frottis, avec une peinture opaque assez pâteuse qui ne se dépose que sur les crêtes,
permet d'obtenir, observée à distance, un mélange optique des couleurs. S'appliquant aussi sur
une surface sèche ou presque sèche, son effet est absolument différent de celui du glacis ; la
couleur résultante est plus lumineuse et moins saturée que celle qu'on obtiendrait par mélange
des pâtes6.
La théorie des effets d'un glacis dispose de plusieurs modèles, dont l'approximation de Kubelka-
Munk est le plus simple7. Toutefois, le nombre et la variabilité des paramètres impliqués
impliquent que la maîtrise du glacis reste une compétence pratique du peintre.
Glacis local
Ce glacis peut être local sur un motif ou général sur l'ensemble de la toile.
Un glacis local va permettre de travailler la profondeur d'un motif particulier : le lointain bleuté
dans un paysage, le modelé d'un fruit dans une nature morte.
Glacis général
Un glacis uniforme, posé sur toute la toile, va permettre de régler l'harmonie générale du tableau.
À base de jaune-orangé par exemple, il va apporter une atmosphère plus chaleureuse à
l'ensemble. Plus bleuté, il contribuera à refroidir l'atmosphère.
Le vernis appliqué pour protéger la couche picturale fait toujours effet de glacis ; son
jaunissement avec le temps participe à la patine. Comme les couches de glacis à l'huile sont très
minces et partant, fragiles, on préconise le double vernissage, afin de ne pas risquer de retirer,
lors d'une restauration, la partie superficielle de la peinture8.
En dehors de ce vernis, le glacis n'est pas toujours la dernière couche picturale. Assez
fréquemment, les artistes ont peint sur le modelé des reflets ou des fines arrêtes en peinture
blanche opaque, classiquement céruse, qui, de cette manière, restent le plus blanches possible,
sans perturber l'équilibre général des couleurs.
Histoire
Le glacis est un procédé inventé avec la peinture à l'huile, probablement sous l'influence de l'art
de la laque chinoise9 pour rendre l'effet de transparence des tissus ou la vibration de la chair.
Cennino Cennini, au XIVe siècle, préconise des glacis à l'huile sur une couche de tempera à
l'oeuf10.
Cette pratique a mené à la mise au point de nombreux médiums à base de résine et d'huiles
siccatives, crues ou cuites, destinés à permettre une moindre attente entre deux couches et à
obtenir différents effets.
On peut situer ses débuts à la Renaissance, avec les primitifs flamands tout d'abord, qui
recherchaient un certain illusionnisme, puis avec les Vénitiens. Dans la peinture flamande, il y a
souvent la superposition de nombreuses couches de glacis, permettant de créer des couleurs
profondes et des nuances raffinées par la superposition des couleurs et de renforcer ainsi le
réalisme des représentations. Le sfumato pratiqué par Léonard de Vinci est possible grâce à la
superposition des glacis et vélatures. La pratique du clair-obscur, de Léonard à Rembrandt en
passant par Caravage et La Tour, a également porté le glacis à un haut degré de
raffinement [réf. nécessaire].
Au XIXe siècle, les artistes recherchent des procédés plus rapides et moins laborieux, ce qui
amène à des expériences parfois désastreuses avec les siccatifs. À la fin du siècle,
l'impressionnisme favorise la peinture alla prima, sans superpositions ni, évidemment, glacis. La
technique reste à l'honneur dans la peinture académique.
Mise en oeuvre
La pratique du glacis est surtout pratiquée en peinture à l'huile car la brillance de l'huile est la
plus à même de créer cet effet de profondeur.
Un glacis se pose à sec ; c'est donc une technique lente, il faut attendre que la couche inférieure
soit au moins partiellement sèche. On mélange une petite quantité de la couleur désirée, qui doit
être transparente, à du liant (huile, liant acrylique) ou de médium à peindre, voire de médium à
glacis . L'intensité de la coloration dépend de l'épaisseur de la couche. Des artistes comme
Léonard de Vinci11 ou le Titien étendaient la couche avec le doigt afin de la rendre plus fine en
certains endroits du tableau pour réaliser un fondu entre les couleurs12.
En peinture à l'huile, les plus beaux glacis sont obtenus par dilution de la couleur avec de l'huile
standolie ou de l'ambre [réf. nécessaire].
Les pigments laques (alizarine) sont donc conseillés[réf. nécessaire]. L'artiste se référera pour cela
au degré de transparence indiqué par le fabricant sur le tube de couleur (mentionné par un carré
vide ou un T).
Bibliographie
références modernes
Ségolène Bergeon-Langle et Pierre Curie, Peinture et dessin, Vocabulaire typologique et
technique , Paris, Editions du patrimoine, 2009, 1249 p. (ISBN 978-2-7577-0065-5), p. 738
« Glacis »
André Béguin, Dictionnaire technique de la peinture, 1990, p. 313-314 « Glacis »
Jean Petit, Jacques Roire et Henri Valot, Encyclopédie de la peinture : formuler, fabriquer,
appliquer , t. 2, Puteaux, EREC, 2001, p. 346 « Glacis »
Anne Souriau (dir.), Vocabulaire d'esthétique : par Étienne Souriau (1892-1979) , Paris, PUF,
coll. « Quadrige », 2010, 3e éd. (1re éd. 1990), 1493 p. (ISBN 978-2-13-057369-2), p. 835
« Glacis »
Xavier de Langlais, La technique de la peinture à l'huile , Flammarion, 2011 (1re éd. 1959)
Patrice de Pracontal, Lumiere, matiere et pigment : Principes et techniques des procédés
picturaux, Gourcuff-Gradenigo, 2008, 463+XVI p.
manuels
Jean-Pierre Brazs, « Glacis, effets et techniques » [archive], 2003.
Laurent Vauxion, Les glacis à l'huile : recettes, secrets, lumière, monotype, Ulisseditions,
2012, 127 p. (présentation en ligne [archive])
thèses
Gaël Latour, Les couches picturales stratifiées : analyse et modélisation de l’aspect visuel :
Thèse doctorale de physique. Université Pierre et Marie Curie - Paris VI , 2007 (lire en
ligne [archive]).
Lionel Simonot, Étude expérimentale et modélisation de la diffusion de la lumière dans une
couche de peinture colorée et translucide (Thèse doctorale. Physique. Université Pierre et
Marie Curie - Paris VI), 2002 (lire en ligne [archive]).
sources historiques
Roger de Piles, Elemens de peinture pratique : Nouvelle édition entièrement refondue et
augmentée considérablement par Charles-Antoine Jombert , Paris, 1766 (1re éd. 1684) (lire en
ligne [archive]), p. 117-119
Jean Félix Watin, L'art du peintre : , doreur, vernisseur, ouvrage utile aux artistes et aux
amateurs qui veulent entreprendre de peindre, dorer et vernir toutes sortes de sujets en
bâtimens, meubles, bijoux, equipages, etc... , Paris, 1773, 2e éd. (1re éd. 1772) (lire en
ligne [archive])
Jean-Baptiste-Claude Robin, « Glacis », dans Claude-Henri Watelet, Pierre-Charles Levesque,
Encyclopédie méthodique : Beaux-arts , t. 1, Panckoucke, 1788 (lire en ligne [archive]), p. 336-
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dans ce genre de peinture, depuis Hubert et Jean Van-Eyck jusqu'à nos jours , Paris, Mme
Huzard, 1830 (lire en ligne [archive])
Jacques-Nicolas Paillot de Montabert, Traité complet de la peinture, t. 9, Paris, Bossange
père, 1829-1851 (lire en ligne [archive]), p. 61-65 « Glacis »

https://fr.wikipedia.org/wiki/Glacis_(peinture)


Commentaires

Nicole a dit…
Merci Didier,pour ce texte très documenté.
La technique du glacis est fascinante et le résultat est toujours éblouissant et magique.
Biz.
Nicole

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